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LA MÊLÉE

n’avait fui. Le même héroïsme forcené animait tous les combattants.

Harrisson, bouleversé, manœuvra la manette de latitude. Rapidement, il fouilla du regard les riches territoires du Sud, revint chez les Lahoristes, suivit les alignements méditerranéens. Une vive agitation se manifestait partout ; de nombreux avions étaient tirés de leur garage et prenaient leur vol ; çà et là, des rassemblements tumultueux se formaient. Cependant, l’arrière-pays était encore indemne ; on n’y constatait ni dégâts ni actions de guerre.

Harrisson eut une lueur d’espoir : la terrible friction d’avant-gardes à laquelle il venait d’assister n’aurait peut-être pas de suites ; un arbitrage pouvait peut-être intervenir encore…

Il revint à la latitude 10, fit glisser le champ de vision suivant le parallèle. Et, aussitôt, son espoir s’évanouit : la folie guerrière était bien, cette fois, véritablement souveraine.

Des côtes de l’Atlantique aux montagnes d’Abyssinie, partout où les hommes du Nord se trouvaient en contact avec leurs frères du Sud, la bataille commençait ou faisait déjà rage, ou même s’achevait dans une orgie furieuse.

Les cadavres s’entassaient aux terminus des chaussées lahoristes. Dès les premiers moments, beaucoup de ces chaussées avaient été coupées par des avions sudistes, et les pèlerins innombrables qui étaient venus par glisseurs, aux fêtes du Beïram, avaient été massacrés en quelques instants, par masses profondes, avant de pouvoir se disperser dans les campagnes. En certains points, des milliers de personnes avaient été fauchées du même coup.

Les gares internationales demeuraient intactes,