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LA MÊLÉE

errèrent, cherchant du secours peut-être, ou quelque moyen de salut. Soudain, il leva le bras, pointa, à courte distance, un lance-torpille. Une flamme jaillit, droite au départ, puis rapidement recourbée en spirale. Et ce fut le vide devant la maison ; une giration formidable emportait en l’air, comme des fétus, des branches d’arbres, des pierres, des débris humains. Les assaillants qui se trouvaient au bord de la zone dangereuse avaient été culbutés comme par un cyclone. Le tireur lui-même, obligé de viser trop près, s’était abattu. Il se releva presque aussitôt et se mit à courir, désarmé, hagard, se heurtant à ses ennemis. Des mains l’agrippèrent ; il cogna, mordit, disparut sous une grappe de corps enchevêtrés. Il reparut, porté à bras tendus comme sur un pavois ; ses membres brisés pendaient. Une femme, qui brandissait une torche, lui brûla les mains. Avec de grands cris de joie féroce, on le jeta, pantelant, dans un hangar en flammes.

Salem s’était évanoui. Harrisson emporta le vieillard et le confia à Lygie. Quand il revint à l’appareil, il chercha vainement sur l’écran la maison de l’ingénieur et la foule musulmane : les avions des deux partis étaient entrés en jeu, et, déjà, ils avaient fait place nette.

Harrisson élargit le champ de vision. Toute la région était méconnaissable. Quelques minutes avaient suffi pour la destruction d’un alignement de plusieurs kilomètres, comprenant des centaines de maisons. La chaleur effroyable des désintégrations avait allumé un immense incendie qui dévorait toute matière combustible. Les constructions métalliques jonchaient le sol, aplaties, écrasées ou bien écartelées par les explosions. Les arbres gisaient et flambaient ; le sol, troué de vastes cratères, était