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LA MÊLÉE

Les gouvernants sudistes, dominés par Endémios, réagirent avec d’autant plus de violence qu’une sérieuse agitation des méridiens leur donnait en même temps de l’inquiétude ; cette querelle nationale venait à point pour distraire l’opinion des questions de politique intérieure.

Endémios fit interdire toute propagande religieuse par les Nouvelles Générales. Aussitôt, les Nordistes décidèrent l’installation d’un réseau cinétéléphonique absolument indépendant du réseau universel ; mais ce projet se heurta à l’opposition inattendue du Parlement mondial, et le gouvernement de Lahorie n’osa passer outre.

Victorieux, Endémios poursuivit son avantage. Il était difficile d’interdire complètement l’accès des territoires du Sud aux voyageurs du Nord ; on s’ingénia donc, par des moyens détournés, à rendre pratiquement impossible les grands pèlerinages.

Le fanatisme musulman s’en trouva accru. Parce que certains points des territoires sudistes ne devenaient accessibles qu’au prix des plus grands efforts, ils acquirent la réputation de lieux saints. L’amour de la difficulté échauffait les âmes ; la beauté du sacrifice les enflammait d’orgueil. De nombreux pèlerins franchissaient isolément la frontière. Leurs démêlés avec les infidèles ou avec la police nationale du Sud faisaient l’objet de beaux récits héroïques ; des prédicateurs d’une éloquence barbare recueillaient ces récits et en tiraient grand parti.

Lahorie et les principaux membres du gouvernement, sommés chaque jour de prendre des mesures contre les Sudistes, voyaient approcher l’heure où ils ne pourraient plus contenir le mouvement religieux. Ils ne s’en inquiétaient pas outre mesure,