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LES HOMMES FRÉNÉTIQUES

au petit jour, des limiers sur le point d’être découplés, ils donnaient de la voix, saluaient l’aurore des temps nouveaux d’un hourvari brutal.

Plusieurs semaines se passèrent en discussions orageuses sans que le Parlement entreprît véritablement la besogne législative.

À la lumière de ces premiers débats, des rivalités secondaires étaient apparues entre députés de la majorité. Rivalités de personnes d’abord : les grands chefs, fort ambitieux, se jalousaient ouvertement. Lahorie, dont le lyrisme indiscret fatiguait l’assemblée, avait été, dès les premiers jours, en butte aux sarcasmes d’un éloquent et subtil député de l’Afrique du Sud, le philosophe Endémios. Les deux hommes, bien qu’appartenant au même parti, étaient séparés par une haine grandissante.

Enfin, par-dessus tout, les rivalités ethniques s’accusaient plus fortement de jour en jour. Les Jaunes d’Asie s’opposaient aux Hindous et aux Australiens ; les Américains du Nord observaient avec méfiance les Américains du Sud, plus nombreux, plus actifs et pleins de jactance ; de vieux foyers de haine menaçaient de se rallumer en Europe entre les races nordiques et latines ; une hostilité déjà bruyante existait entre les Sémites méditerranéens, dont Lahorie demeurait le porte-parole, et les Sud-Africains, groupés autour d’Endémios.

Depuis la première réunion du Conseil Suprême dans les ruines de San Francisco, le siège du pouvoir central était demeuré le même. Nul, jusqu’à présent, ne s’en était jamais plaint, car la rapidité des communications aériennes rendait faciles les plus grands voyages. D’ailleurs, depuis longtemps déjà, grâce aux perfectionnements du cinétéléphone, les élus qui redoutaient les déplacements pouvaient