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CHAPITRE VII

LES CLOCHES


Bas-Bleu mourut au commencement de mai. Le dimanche qui suivit l’enterrement, Séverin étant de garde aux Arrolettes détacha les vaches sur les neuf heures et les conduisit vers la lande aux Abreuvoirs. C’était à cinq cents pas du village, un mauvais pacage situé au flanc d’un coteau très raide ; il n’y poussait que du genêt, de la bruyère et, au printemps, un peu d’herbe dans les bas ; les Abreuvoirs étaient des fossés toujours remplis d’une eau noire et froide où s’enfonçaient les images pâles des peupliers de bordure.

Il y avait une charrière du côté de la route ; Séverin alla s’y asseoir les genoux au menton, face au soleil et à ses bêtes.

Les cloches, au bourg, carillonnaient dans l’air jeune ; leur voix passait avec le vent frais, semeur de vie ; et cette musique du dimanche et cette musique du printemps venaient avec une douceur de caresse sur la campagne verte pleine d’éclosions mystérieuses. Séverin songea à un autre bruit de cloches, morne celui-là, à une pluie de notes tombant, lourdes, comme des pierres de démolition. Et il dit en lui--