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les écoutait se vanter à leur tour de leurs trouvailles et il recueillait des renseignements dont il profitait. Il put ainsi trouver sans peine trois nids de merles ; il dénicha douze petits qu’il mit dans une cage et que Bas-Bleu mangea l’un après l’autre, cuits avec un peu de beurre dans une pomme de terre creusée.

Bas-Bleu était sa préférée ; elle toussait toujours beaucoup et cela inquiétait son père.

Pour lui faire un remède, il fallait, entre autres choses, du cresson ; Séverin en cueillit de-ci, de-là. Or, le cresson n’est pas tout à fait à celui qui le trouve ; c’était une demi-maraude. Un an plus tôt, Séverin n’aurait jamais fait cela. Il eut encore une hésitation ; mais, à force de se débattre contre la misère, il s’habituait à ces hésitations-là. Bas-Bleu était malade, il fallait du cresson pour la guérir ; alors quoi ? demander, demander toujours ! On s’en lasse encore plus vite qu’on ne se lasse de donner.

Séverin, en coupant du cresson dans le Pré-Bas des Larin, se disait :

— Quand je verrai le voisin, il faudra que je le prévienne ; ça vaudra mieux.

Il le vit le soir même ; mais Larin était justement un sauvage, très dur au pauvre monde ; n’avait-il pas grondé méchamment les bessons qui ramassaient des bouses sur le chemin Roux, près du Haut-Village ? Séverin, craignant d’être mal accueilli, garda la chose pour lui.

Et, bien mieux, le dimanche suivant, il revint dans ce même pré où coulait un petit ruisseau peuplé de grenouilles et de vairons ; il y revint avec un grand