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Or, un dimanche matin, un fermier du Haut-Village se plaignit en passant de ce qu’on eût pillé les basses branches d’un marronnier tardif qui n’avait pas encore été gaulé ; à son idée, les coupables étaient les drôles des Pelleteries : deux Maufret sans doute et les Pâtureau.

Séverin appela les petits et les interrogea ; ils nièrent. Le fermier, qui d’ailleurs n’attachait aucune importance à l’affaire, avoua qu’il avait pu se tromper. Mais Séverin n’aimait pas ces contes ; bien que le crime ne fût pas absolument prouvé, les deux enfants reçurent une énergique correction. Quand ils eurent cessé de crier, leur père les emmena à un détour du Chemin-Roux où poussait une grosse touffe de genêt. Là, il leur fit couper à chacun un maître scion qu’il essaya sur leurs mollets et qu’il emporta ensuite à la maison. Puis, quand les deux branches de genêt furent placées sur la cheminée, l’une à droite du clairon, l’autre à gauche, Séverin les montra à ses quatre aînés.

— Les drôles ! vous voyez ces scions verts : si je les descends, ce sera une pitié. Quand j’étais petit, j’ai été malheureux comme les pierres et votre tante Victorine aussi. Mais nous n’avons jamais pris un épi dans une gerbe ni une égrenelle devant les ramasseurs. Eh bien ! mes drôles ne le feront pas non plus ! Remarquez ce que je vous dis : si j’apprends une autre fois que vous avez fait tort à quelqu’un d’une poire, d’une prune, d’une épingle, d’un grain de froment, je prends ces scions et je vous pèle les fesses !

Les bessons étouffèrent leurs sanglots, car le père parlait d’une voix très dure. Il était bon pour eux.