Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/148

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

on était donc revenu à l’ancienne mode : on mangeait au même plat et on buvait l’eau claire au même pot de fer émaillé, sur lequel gambadaient des vaches bleues. Pourtant, ce jour-là. Chauvin ayant tiré une pichetée à la barrique, les filles donnèrent des verres ; car on respecte le vin chez les gens qui n’en boivent pas journellement.

Dans la pièce la plus propre, dans la chambre aux filles, les maîtres mangeaient aussi ; on entendait leurs rires et le bruit des verres ; ils avaient apporté de la viande froide que la Chauvine faisait réchauffer et servait. Les chiens ayant fait le tour des bâtiments étaient venus trouver les gens de la maison ; un épagneul pénétra dans la laiterie et se mit à laper le lait d’une terrine. Henriette s’élança :

— Sous ! sous ! chenaille !

Comme la bête ne s’éloignait pas, elle dut la repousser doucement, sans frapper, de peur d’un aboiement qui aurait déplu aux maîtres.

Quand les chasseurs et leurs chiens furent partis, ce fut un soulagement ; les langues se délièrent. Lucien craignait de compromettre son oncle en parlant librement devant les deux valets nouveaux qu’il ne connaissait guère ; mais Florentin fut le premier à se plaindre des Magnon qui avaient fait trois grandis brèches à la même haie dans la matinée.

— Chaque fois qu’ils viennent chez nous, dit-il, c’est la même chose. Il faut passer une demi-journée à réparer le dommage, et quelle récompense avons-nous ? Trois cents francs d’augmentation à chaque bail.