Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/101

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tu aurais eu de belles robes, de beaux rubans à ta coiffe et une montre, et des colliers…

Il ajouta tout bas :

— Mais de l’amitié, tu n’en aurais pas eu davantage. Non, bien sûr ! un gars riche n’aurait pas été plus fort d’amitié.

Le soir, après la soupe, Delphine et Séverin sortirent dans le village. C’était l’heure de la semaine ou les creux-de-maisons vidaient tout leur monde sur le seuil au bord du chemin Roux.

Les hommes, assis sur ces blocs de granit brut qui trament toujours autour des bâtisses, causaient lentement ; quelques-uns fumaient. Les femmes s’inquiétaient des nouveau-nés, des peines de la grossesse et des filles qui tournent mal. Autour d’elles les enfants, assagis par le crépuscule, jouaient plus mollement, lissant de leurs pieds nus la poussière devenue fraîche. Séverin rejoignit le voisin Maufret qui causait devant sa porte avec d’autres hommes. Maufret était un homme d’âge ; il avait de grosses épaules et beaucoup de poil aux oreilles ; son col de chemise largement ouvert laissait voir sa poitrine velue et grise. Il fumait une pipe de terre très courte ; ç’avait été autrefois un grand fumeur et même, durant ses sept années de service, il avait beaucoup chiqué. Mais il n’avait jamais gagné quatre cents francs, et sa femme allait avoir son douzième ; il était obligé de se priver de tabac.

Il ne fumait que le dimanche, et pour compenser