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leurs pouvoirs. Il paya de paroles plusieurs autres légats qu’il ne put gagner prix d’argent. Ainsi il prolongeait l’exil de Thomas, le harcelait de vexations, l’abreuvait d’amertumes. Enfin, ce qui lui importait le plus, il accoutumait peu à peu le simulacre d’Église qui subsistait dans ses États à se détacher de l’autorité papale et primatiale, au point qu’ayant voulu associer son fils aîné à la couronne, il le fit sacrer par l’archevêque d’Yorck, au mépris des priviléges de l’Église de Cantorbéry et des prohibitions formelles du souverain pontife[1].

Contre tant d’ennemis, contre tant d’attaques savamment combinées, Thomas n’avait pour lui que les voeux du pauvre peuple dont on ne se souciait guère, l’amitié de quelques moines qui partageaient son infortune, la bienveillance de plusieurs personnages haut placés, mais qui pouvaient rien sur son persécuteur, et l’approbation d’un vieillard entouré de piéges et opprimé comme lui. Mais ce vieillard était le Pape, et avec lui était le droit, et le droit, c’est la force morale contre laquelle la force physique ne peut prévaloir. C’est pourquoi ce qu’il y a de plus redoutable sur la terre, l’or et le fer, ce qu’il y a de plus dangereux parmi les hommes, l’intrigue et la peur, tout vint se briser devant l’intrépidité de Thomas. Tandis que son génie, porté sur les ailes de la foi, décou-

  1. Quadrilogus I, II, et les autres auteurs contemporains, passim