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disait les songes prophétiques de cette femme étonnante, lorsqu’elle portait dans son sein ou berçait sur ses genoux Thomas, le fils unique de ses entrailles. On savait qu’à l’ombre du cloitre de Merton cet enfant avait crû en âge, en science et en vertu, que sa jeunesse s’était passée dans de longues et fortes études aux universités d’Oxford, de Paris et de Bologne, que Théohalde, le dernier archevêque de Cantorbéry, l’avait nommé son archidiacre, lui avait confié d’importantes missions, et avait souvent reçu de lui d’utiles conseils. A la recommandation de ce prélat, Henri II l’avait choisi pour en faire le dépositaire de ses faveurs, le chancelier de son royaume et le gouverneur de son fils. Au milieu de ces hautes fonctions, Thomas avait rencontré bien des ennemis parmi les hommes, et bien des dangers dans les choses. Il lui fallait lutter tous les jours contre l’avarice du monarque et contre la’ rapacité des courtisans ; les tentations de l’orgueil et de la volupté devaient troubler jusqu’au repos de ses nuits. Pourtant sa justice avait rarement fléchi, le pays tout entier bénissait la sagesse de son administration, le renom de sa générosité s’était répandu au delà des mers avec ses bienfaits, et au milieu de la fange d’une cour corrompue sa chasteté était restée sans tache. Maintenant il était à la fois dans toute la force de l’âge (environ quarante-quatre ans) et dans toute la puissance de son crédit. Jamais deux