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porta ses lumières et ses conseils, un dévouement qui semblait sans réserve, une plume habile et complaisante ; il reçut en retour un patronage honorable et une amitié fructueuse. Il reçut plus encore : le comte d’Essex, n’ayant pu lui obtenir la charge de solliciteur général, lui fit présent d’un domaine de plus de dix-huit cents livres sterling. Ce jour-là, sans doute, entre le bienfaiteur et celui qui acceptait le bienfait s’échangèrent des paroles d’attachement éternel.

Enfin vint l’heure où, sur les premiers degrés du trône, les deux partis durent se livrer un combat décisif. Des présages sinistres menaçaient le comte d’Essex, une fatalité inéluctable semblait s’appesantir sur lui d’erreurs en erreurs, il se précipita dans l’entreprise téméraire de renverser par la force le ministre Robert Cecil, et de gouverner à sa place. Le complot fut éventé, et le comte, pris les armes à la main, fut livré à la vengeance de ses ennemis par la faiblesse de la reine, qui n’osa point défendre un ami autrefois si cher. Le procès fut instruit. Coke devait porter la parole ; Bacon, comme conseiller extraordinaire de Sa Majesté, fut invité à soutenir l’accusation. Ses fonctions ne lui en faisaient point un devoir ; il avait même devant lui l’exemple de sir Yelverton, qui, sous le règne d’Édouard VI, avait préféré encourir la colère du roi plutôt que d’accomplir sa charge en plaidant contre le comte de Somerset, son protecteur. Cet