Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/364

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

peu sous l’influence du Christianisme, le défrichement des terres s’accrut en raison inverse, et, la propriété du sol acquit plus d’intensité. Mais ici c’est assez de faire observer que la propriété est un besoin pour l’homme ; c’est pour ainsi dire une extension du moi, de la personnalité ce que l’homme possède devient comme un autre lui-même ; c’est une sphère qu’il se crée pour le développement de son activité, de telle sorte qu’à la propriété est attachée l’indépendance, et que celui qui ne possède pas devient mercenaire, c’est-à-dire soumis pour le gain de sa subsistance au bon plaisir d’autrui[1] Ils seraient donc mercenaires tous les membres de la société saint-simonienne : donc ils cesseraient d’être libres.

  1. La propriété reçue ou acquise, obtenue par le travail ou par l’hérédité, se présente sous l’une et l’autre de ces deux formes, comme l’expression vive des affections, des besoins de la nature humaine. D’une part, la propriété acquise est une création de l’activité de l’homme ; c’est le résultat de son développement. Il la chérit donc comme étant l’œuvre de ses efforts, le prix de ses sueurs, comme le miroir fidèle où viennent se réfléchir tous les travaux de sa vie. La propriété héréditaire a une valeur analogue elle est pour l’homme le monument de l’activité de ses pères, l’expression de leur sagesse, de leur industrie. Dépositaire des souvenirs domestiques, des affections les plus douces ; témoignage de la sollicitude des aïeux pour leurs petits-fils, elle est féconde en pensées consolantes : il semble que l’esprit des ancêtres y veille, préside encore : aussi est-elle l’objet d’une sorte de culte, de vénération filiale. Il est une troisième espèce de propriété, prix impur de l’injustice personnelle ou héréditaire celle-là, la conscience la désavoue, et la religion la flétrit.