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pas assez la nouvelle doctrine, donnant l’action de grâces pour expression à l’amour de Dieu, proscrit la prière, « car, dit-elle, c’est faire injure à la Divinité que de la supposer capable de changer d'avis pour une prière d’homme.»[1] Mais le chrétien qui prie n’a point la présomption de croire que sa demande puisse changer la volonté du Tout-Puissant : il sait que dans l’ordre des décrets éternels, les bienfaits de Dieu se répandent sur l’homme à la condition de la prière ; non pas que celui qui voit tout ait besoin de l’exposé de nos nécessités pour nous secourir, mais parce que l’invocation est un acte libre de foi, d’espérance et d’amour, une éclatante confession de la faiblesse humaine et de la puissance divine, par conséquent un acte méritoire, digne de récompense. Et comment, lorsqu’on repousse la prière, admettre l’action de grâces qui s’y rattache de si près ? L’action de grâces est l’hymne de la reconnaissance, et la reconnaissance suppose dans le bienfaiteur la liberté de répandre et de retirer ses dons ; cette liberté, à son tour, nécessite un motif qui fasse agir et certes, s’il est vrai qu’une prière d’homme est un mérite, un sacrifice solennel, n’est-ce donc point assez pour peser quelque peu dans la balance des justices du Très-Haut ? Puis, la prière est un besoin pour l’âme : le sentiment de ses

  1. Le Précurseur du 19 mai.