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saient pêle-mêle, bien portants et malades, et des garçons de dix-huit ans avec des filles de seize. Ne parlons pas du délabrement des habits, qui est tel, que dans la même maison vingt enfants ne peuvent fréquenter les écoles faute de vêtements. Du moins faut-il que ces malheureux trouvent quelque part leur nourriture, et que, s’ils périssent de consomption, il ne soit pas dit qu’ils meurent littéralement de faim dans la ville la plus civilisée de la terre. Plusieurs vivent des restes que leur distribuent à travers les grilles du Luxembourg les cuisiniers de la troupe casernée dans le château. Une vieille femme s’est nourrie huit jours des morceaux de pain qu’elle ramassait dans les immondices et qu’elle détrempait dans l’eau froide. Il est vrai que la bienfaisance de la nation arrivait au secours d’une si cruelle détresse : les distributeurs qui vont frapper tous les dix jours à la porte des ouvriers sans travail y laissent un bon d’un kilogramme de viande et trois kilogrammes de pain pour chaque bouche c’est à peu près la valeur de douze centimes et demi par jour, et c’est pour le douzième arrondissement seul la somme énorme de cent quatre-vingt-dixhuit mille francs par mois.

Assurément le quartier Saint-Jacques et celui du Jardin-des-Plantes ne donnent pas toujours le spectacle de la même désolation. Nous y connaissons des rues marchandes, des maisons pauvres, mais habitables, des chambres étroites, mais bien tenues,