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mière , à la vue de l’image divine dont elle garde les traits défigurés, l’âme se repent ; et du repentir jaillissent les larmes. Le poëte en reconnaît la secrète vertu : «  Ô larmes ! s’écrie-t-il, vous avez la force et la grâce: à vous appartient le pouvoir et à vous la royauté. Vous vous en allez seules devant le juge, et nulle crainte ne vous arrête en chemin. Jamais vous ne revenez sans fruit : par l’humilité vous avez su vaincre la grandeur, et vous enchaînez le Dieu tout puissant ! » Mais il n’est pas de repentir efficace sans un ferme dessein de satisfaire, d’expier, de déraciner l’herbe mauvaise du vice. La volonté est comme «  le fort laboureur qui souffre le froid et le chaud péniblement courbé sur la terre, il ne l’abandonnera pas qu’il ne l’ait nettoyée : jamais la pensée ne lui viendrait de reposer dans son lit, tandis que son champ resterait sans culture. » La mortification châtiera donc les sens en les disciplinant ; elle punira l’ouïe par des paroles sévères, le goût par l’abstinence, l’odorat s’endurcira au service des malades, le toucher se purifiera sous le cilice, jusqu’à ce que la chair domptée se rende, et promette de ne murmurer plus[1]

  1. Jacopone, lib. V, 15 ;ibid.. 23, stance 11

    O lacryma con grazia gran forza hai
    Tuo è lo regno e tua è la potenza
    Sola davanti al giudice ne vai
    Ne ti arresta da cio nulla temerenza etc...
      

    Ces beaux vers rappellent un admirable passage de saint Pierre