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ont fait ensemble un grand festin ; toute bonne coutume s’est évanouie. De là mes larmes et mes gémissements. — Où sont tes patriarches pleins de foi… les prophètes pleins d’espérance ?… Où sont les apôtres pleins d’amour… et les martyrs pleins de force ? — Où sont les prélats justes et fervents, dont la vie faisait le salut des nations ? La pompe, la puissance et les grandeurs sont venues me gâter une si noble compagnie. — Où sont les docteurs pleins de sagesse ? J’en vois beaucoup qui ont grandi en science, mais leur vie ne s’accorde point avec mes lois. ils m’ont foulée aux pieds, jusqu’à désoler mon cœur. — Ô religieux ! votre tempérance faisait jadis mon plaisir. Maintenant, je vais visitant tous les monastères : il en est peu où mon âme soit consolée… — Nul n’accourt à mes cris. Dans tous les États je vois le Christ mort. Ô ma vie ! ô mon espoir ! ô ma joie ! Dans tous les cœurs, mon Dieu, je te vois étouffé[1]. »

Mais si l’amour trompé inspirait ces lamentations, la politique des Colonna s’en servait. Les plaintes du pénitent de Todi, soutenues de l’auto-

  1. Wadding, ad ann. 1298. Jacopone, Poesie spirituali, IV, IV

    Piange la Ecclesia, piange e dolura,
    Sente fortuna di pessimo stato.

    En ce qui touche le relâchement des prélats, Jacopone n’a pas d’expressions si hardies qui n’aient été égalées par saint Bernard (Epistol. 42 homil. 4) et par saint Antoine de Padoue (Opera, Paris, 1641, p. 261).