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vieux et de ressusciter le mort. Les arbres plantés sur la rive portent aussi des fruits plus doux que miel, tels qu’à les goûter seulement les malades guérissent. Jamais ces arbres ne perdent leur feuillage, et chacun d’eux est si embaumé, qu’à mille lieues et plus s’en répand l’odeur. Chardonnerets, rossignols et autres beaux oiseaux y chantent nuit et jour, répétant des airs plus mélodieux que violes, rotes et chalumeaux.

« Là, dans des jardins toujours verts, s’ébattent les bienheureux chevaliers, qui jamais n’ont d’autre soin que de bénir le Créateur. Là sont les patriarches et les prophètes saints, tous vêtus de riches étoffes, glorifiant Dieu avec des chants et des psalmodies ; les apôtres bénis, les glorieux martyrs, là grande compagnie des confesseurs et les vierges très-saintes, troupe charmante, portant la bannière de l’honneur et de la beauté, chantant une chanson dont le charme est si puissant, que, si quelqu’un peut l’entendre, il ne craint plus de mourir. Cette gent bienheureuse fait un bruit si joyeux, que le ciel, l’air et tout le pays semblent pleins d’instruments et de voix. Et je vous dis encore, sans mentir, qu’en comparaison de ces voix, celles de la terre vous sembleraient mugissements de bœufs, quand vous entendriez luth, vielle, orgue et symphonie, sirène ou fée des eaux ! Car c’est le Roi divin, assis sur le trône, qui leur a montré à solfier et à suivre ce chant.