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grandes affaires, ni la gloire chevaleresque des troubadours et des trouvères. Mais on ne peut nier ce qu’il y avait de barbare dans l’isolement orgueilleux de ces hommes forts, ne relevant que de leur épée, ne connaissant d’autre loi que la leur, ni d’autre justice que celle du gibet plante devant la porte de leur château en signe de juridiction souveraine, et comme en souvenir de ce passage de la loi salique «  Quand un homme libre aura coupé la tête à son ennemi et l’aura fichée sur un pieu devant sa maison, si quelqu’un, sans son consentement, ose enlever cette tête, qu’il soit puni d’une amende de six cents deniers. »

Quels services elle rendit.

La mission de l’aristocratie militaire fut de tempérer la monarchie. Quoi de plus violent que ces leudes que nous avons vus entourer le trône des Mérovingiens ? Ils rendirent cependant à la société ce service, de ne pas permettre le funeste succès d’une restauration de l’antiquité romaine, qui en eût fait revivre tous les maux. Charlemagne, avec la supériorité du génie, comprit l’utilité de ces résistances qui irritent les âmes faibles et précisément parce qu’il se sentait assez fort pour briser l’aristocratie militaire, il le fut assez pour ne pas la craindre. Maître de retenir le gouvernement dans le secret de ses conseils, il lui donna la publicité des assemblées et la vie des discussions ; mais il n’avait laissé le pouvoir dans le corps indiscipliné des anciens leudes qu’en y mettant l’ordre et la