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Hésitation de Chartemagne.

En attribuant aux papes l’initiative de l’acte qui restaura l’empire d’Occident, je ne pense pas diminuer le rôle de Charlemagne ; je le relève, au contraire. Quand Éginhard assure que le prince des Francs, au milieu des cris qui lui déféraient la couronne, exprima sa surprise et son déplaisir, protestant que, s’il avait prévu l’événement, il ne fût pas venu prier à Saint-Pierre, malgré la solennité du jour ; devant ce témoignage grave, je ne suppose point que Charlemagne ait joué le mécontentement, ni usé d’une dissimulation étrangère a sa grande âme. Il est plus facile de le croire sincère, et d’admettre que son génie le préserva de l’erreur des Mérovingiens, de cette passion qui les avait poussés à renouer sans discernement et sans réserve toutes les traditions de l’antiquité. On s’en aperçoit à sa répugnance pour le costume du Bas-Empire, que Clovis avait revêtu avec tant d’orgueil. Les instances d’Adrien et de Léon III ne le décidèrent que difficilement à prendre deux fois la tunique longue, la chlamyde et la chaussure des patrices. Charlemagne eut le mérite de ne pas oublier sa vieille patrie germanique, d’en garder les habitudes militaires, les mœurs simples, le pourpoint de peau de loutre, au milieu de ses officiers couverts d’or et de soie. Il aima la langue de ses aïeux, il l’honora, et voulut la faire entrer pour ainsi dire dans la famille des langues savantes, en composant une grammaire teutonique ; en dressant un calen-