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une société nouvelle. C’est dans les angoisses du neuvième et du dixième siècle qu’on voit se former les traditions et les doctrines qui inspireront le moyen âge. Regardez de près les canons d’Aix-Ia-Chapelle vous y trouverez contenue toute la querelle du sacerdoce et de l’empire : elle éclate en 857, par le divorce du roi Lothaire et par la résistance du pape Nicolas I°. Au siècle suivant, la légende conduit déjà Charlemagne à Jérusalem : elle ouvre ainsi le cycle fabuleux des romans carlovingiens, en même temps qu’elle échauffe le zèle de la guerre sainte et qu’elle montre le chemin des croisades. Ne nous étonnons pas de la fécondité de cette période, où le génie germanique et le génie latin vivaient encore dans une orageuse mais puissante union. Toute cette majesté du saint-empire romain, qui fit l’orgueil de l’Allemagne, n’est, après tout, que l’ouvrage des Francs. L’Allemagne elle-même le savait si bien, qu’elle tint longtemps pour maxime de droit public que l’empereur, fût-il Saxon d’origine, devenait Franc par le fait de son élection, et que le couronnement, pour être valide, devait se faire sur une terre franque. Nous verrons, en effet ; comment Charlemagne ne fit que réaliser, en l’étendant, un dessein conçu mais compromis par la politique des Mérovingiens. D’un autre côté, toute la littérature de l’Allemagne chrétienne a ses origines à une époque où la langue dominante chez les Germains s’appelle encore la langue des Francs, où elle s’é-