Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/328

Cette page a été validée par deux contributeurs.

qu’un fait, l’autorité, qui est, un droit, et une volonté de Dieu pour le bon gouvernement des nations. Voilà pourquoi l’Église sacrait les Césars germaniques, bénissait l’épée des chevaliers, marquait de la statue d’un saint (Weichbild) le territoire des villes affranchies. Elle s’appliquait ainsi à sanctifier le pouvoir, à lui imprimer un caractère moral, à le dégager enfin de ce qui lui restait de matériel et de violent. Mais l’autorité ne s’établissait qu’en prouvant ses titres ; il fallait qu’elle s’adressât à la raison et à la conscience : il fallait donc qu’elle reconnût leurs droits. Et quand la conscience éclairée se soumettait enfin, elle ne se rendait encore qu’à l’évidence d’un devoir, c’est-à-dire d’une loi divine : l’obéissance devenait un sacrifice, l’acte le plus libre dont la nature humaine soit capable. Ces conditions de liberté étaient aussi des conditions de puissance. Comme le pouvoir assis dans les esprits ne s’absentait plus, comme il veillait toujours et se faisait entendre partout, rien ne l’empêchait désormais d’agir avec l’étendue et la durée qu’il faut aux grandes choses. Les peuples, de leur côté, exercés à la discipline, au dévouement, à l’amour du bien public, se trouvaient en mesure de suivre ces entreprises de longue haleine qui veulent l’effort de plusieurs générations, et qui finissent par faire la gloire et la prospérité des États. Sur un territoire morcelé, longtemps peuplé de tribus ennemies, se forma