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formèrent des villes nouvelles. Quoi de plus misérable d’abord que ces cultivateurs et ces tisserands entassés entre d’étroites murailles ? et cependant il s’établissait au milieu d’eux un intérêt commun, c’est-à-dire un principe d’unité, un germe de puissance. Ils apprenaient, chez les moines leurs voisins, à délibérer entre eux, à se donner des chefs, à obéir, à se dévouer pour le bien général. En s’organisant ainsi, les habitants des villes commençaient l’oeuvre de leur affranchissement de sorte que, sans contester la diversité des causes qui concoururent à la même fin, il faut bien reconnaître que l’exemple des communautés fit beaucoup pour la constitution des communes.

La société religieuse reconstitue la société politique.

Ainsi le christianisme avait achevé en Allemagne un grand dessein ; il avait fondé une société spirituelle car la foi et l’amour formaient le lien sacré auquel était suspendue toute l’économie des institutions ecclésiastiques. Rien n’était plus puissant qu’une telle société, puisqu’elle ne connaissait de limites ni dans l’espace ni dans le temps, et qu’elle prétendait régler les affaires de l’éternité. Et cependant rien n’était plus libre, puisque le pouvoir ne s’y exerçait que par la parole et par l’exemple. Mais comme l’ordre ne peut s’établir au milieu du désordre sans attirer tout à lui, la société religieuse n’avait pu se constituer parmi les barbares sans y recomposer la société politique. Ce changement s’était accompli en substituant à la force, qui n’est