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Augustin ait éclairé, dominé, entraîné tous les grands esprits du moyen âge. Pendant que la doctrine mystique des Confessions inspire les âmes contemplatives de Hugues et Richard de Saint-Victor, et que saint Bonaventure écrit le livre de l’Itinerarium mentis ad Deum, la démonstration de l’existence de Dieu, reprise et poussée à sa dernière rigueur par saint Anselme, deviendra un des éléments de la Summa contra gentes de saint Thomas d’Aquin, où ce maître excellent entreprend de prouver, sans le secours de l’Écriture sainte, trois cent soixante-six propositions sur Dieu, l’âme et leurs rapports.

Mais le souvenir de saint Augustin ne pouvait pas remplir ainsi la théologie sans descendre dans les arts qu’elle inspirait: nous savons déjà comment la légende s’était emparée du grand docteur d’Hippone, et l’avait entouré d’une gloire particulière; comment un moine ayant vu, dans un moment d’extase, l’assemblée des saints, et s’étonnant de n’y pas trouver Augustin, reçut ces mots pour réponse, qu’Augustin était bien plus haut, à la dernière sommité des cieux et voilé des rayons de la Divinité qu’il contemplait dans toute l’éternité. Que les moines conservassent une telle mémoire, je ne m’en étonne pas puisque les Sarrasins eux-mêmes, campés sur les ruines d’Hippone, devaient aussi lui conserver un culte, et que, de nos jours encore, les Bédouins des environs de Bone viennent