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tive. C’est ce qui résulte expressément d’une, décision synodale de Rathier, évéque de Vérone, au dixième siècle il y déclare qu’à l’avenir il n’élèvera aux saints ordres aucun postulant qui n’ait étudié les lettres ou à l’école épiscopale, ou dans un monastère, ou auprès de quelque maîtres avant[1]. Ces maîtres libres, qu’un voeu n’engageait point au service des âmes, étaient les véritables héritiers des grammairiens et des rhéteurs de l’antiquité mais, dépouillés de la dotation que leur assignait la loi romaine et qui avait péri dans la ruine de l’empire, ils étaient réduits à traiter avec leurs disciples et à, faire marchandise de leurs leçons. Rathier leur reproche d’avoir vendu plus d’une fois des enseignements qu’il eût fallu ensevelir dans un éternel silence. Benoît de Cluse faisait gloire d’avoir étudié neuf ans chez les grammairiens, mais son savoir lui avait coûté deux mille pièces d’or[2]. Dans cet âge ’où la force semblait maîtresse du monde, la science conduisait encore à la fortune. Alfano, de

  1. Ratherius, Opera 419 « De ordinandis pro certo scitote quod a nobis nullo modo promovebuntur, nisi aut.in civitate nostra, aut in aliquo monasterio, vel apud quemlibet sapientem, conversati fuerint et litteris aliquantulum eruditi. »
  2. Ratherius, Opera 59 « Multi enim lucri ambitu tegenda silentio vendunt loquendo ». Mabillon Annales ordinis S. Benedicti, IV, 726. Adémar y fait parler ainsi Benoît de Cluse, dont il combat les prétentions : « Ego sum nepos abbatis de Clusa. Ipse me duxit per multa loca in Longobardia et Francia, propter grammaticam. Ipsi jam constat sapientia mea duo millia solidis quos dedit magistris meis. Novem annis jam steti ad grammaticam. In Francia est sapientia, sed parum; nam in Longobardia, ubi ego plus didici, est fons sapientiœ.  »