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différents de génie et de destinée : Paulin renonçant aux honneurs, à la fortune, au monde entier, pour aller consumer ses jours au tombeau de saint Félix de Nôle, mais ne renonçant pas à ces vers si doux qui coulaient naturellement comme des larmes, et servaient comme elles à répandre le trop plein de son âme ; Prudence mettant la fin de ses jours au service de la foi, et s’employant à défendre ses doctrines et sa gloire. Nous avons vu la force et la grâce s’accordant, pour tresser ses vers, comme autant de couronnes qu’il vient suspendre, dit-il lui-même, au milieu des fraîches guirlandes dont les fidèles entourent le tombeau des saints. Assurément la poésie est là, mais elle n’y est pas tout entière, elle n’y est pas surtout telle qu’on doit l’attendre après trois siècles de persécution, après Constantin et le concile de Nicée, au temps des Pères, au temps où fleurissent, comme des plantes du désert, ces héroïques anachorètes. Si là nous n’avons pas trouvé complétement la poésie, il faut qu’elle soit ailleurs, il faut qu’il y ait quelque part une source abondante d’où-elle jaillisse, d’où elle déborde et se répande sur les siècles qui suivront.

La source commune de toute la poésie chrétienne, c’est le symbolisme. Le symbolisme est à la fois une loi de la nature et une loi de l’esprit humain. C’est une loi de la nature : après tout, qu’est-ce que la création, si ce n’est un langage