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LETTRES DE FRÉDÉRIC OZANAM

temps de gagner mes éperons, en prolongeant la vacance et en me confiant la chaire, l’année prochaine à titre de chargé de cours, c’est-à-dire à titre précaire.

Je vois parfaitement tous les dangers d’une situation provisoire dans un temps de luttes comme celui-ci, où les dispositions bienveillantes des esprits peuvent changer si promptement. Tout l’effort est donc sur ce point ; plusieurs de mes amis me secondent de leurs démarches mais tous peuvent me soutenir de leurs prières. Du reste, ce que je demande à Dieu, c’est que lui-même prenne la conduite de cette délicate négociation, en sorte que je n’y sacrifie ni mes devoirs d’état par imprudence, ni mon honneur de chrétien par pusillanimité.. Après tout, il peut être utile pour mon salut que je ne réussisse point et, dans ce cas, je ne désire que la fermeté, la résignation, la paix du cœur ; La résignation à tout, même au précaire, même à l’incertitude, qui est peut-être le plus pénible à supporter mais dont il faut bien prendre l’habitude enfin, puisque Dieu l’a mise en toute chose, dans la vie, dans la mort, dans la santé, dans la fortune, et qu’il a voulu nous faire vivre nous qui voudrions être sûrs de nos revenus, de nos projets, de nos succès, dans le plus terrible de tous les doutes : « Si nous sommes à ses yeux dignes d’amour.»