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Faites-moi le plaisir de me dire si je ne viens pas de vous peindre un hiver de Berlin ou de Munich ? Cependant aux bons jours il nous arrive de prendre une voiture bien close et de nous faire conduire à la cathédrale. Là tous les souvenirs du déluge s’évanouissent et nous sommes vraiment pour une heure en paradis. Ah ces vieux maîtres avaient bien compris que l’église doit être une Jérusalem céleste, et ils construisirent celle-ci avec tant de légèreté, qu’on ne saurait dire si elle s’est élevée de la terre, ou si elle y pose seulement, descendue du ciel. Les quatre-vingt-quatre colonnes qui portent ses cinq nefs sont élancées comme les palmiers des jardins éternels. Des anges qu’on croit peints par Guirlandaio, mais qui vivent, assurément, montent et descendent en groupes charmants le long du grand arc qui ouvre le sanctuaire. Et au fond de l’abside, le Christ est assis impassible dans sa gloire, écrasant sous les pieds de son trône le lion et le dragon. A, ses côtés la Vierge et saint Jean représentent l’humanité glorifiée. Ah c’est en présence de cette nouvelle transfiguration qu’on s’écrie de grand cœur « Seigneur, il fait bon ici, dressons-y trois tentes ;» et il semble qu’on passerait les jours et les nuits dans cette basilique toute peuplée de souvenirs des croisades, de marbres antiques, de tombeaux fouillés par les plus fins ciseaux de la Renaissance, sans parler des admirables peintures d’André del Sarto et de Pierin