Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 11.djvu/506

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans la cathédrale, prier sous les voûtes héroïques élevées en 1065 par des croisés qui devançaient Godefroy de Bouillon, et qui du butin fait sur les infidèles érigeaient cette incomparable église. Quelle majesté impassible, éternelle dans les mosaïques de l’abside et comment soutenir le regard immobile du Christ assis dans sa gloire ! quelle grâce dans les colonnades qui divisent les cinq nefs. ! que de merveilles peintes et sculptées, entassées par trois siècles de foi et de génie autour du tombeau de saint Reynier ! Ah que dans ces églises radieuses on s’écrie volontiers : Quam dilecta tabernacula, Domine virtutum! concupiscit et deficit anima mea in atria Domini! Le peuple qui fréquente ces basiliques est bien dégénéré. Mais du moins il a conservé la foi, il ne laisse point dans la solitude les cathédrales de ses pères. Je dis le peuple, c’est-à-dire les gens surtout qui en France ne vont pas à l’église, qui hantent les cabarets et les guinguettes. Souvent la semaine, étant de loisir, j’entends la messe de onze heures, vous ne sauriez croire en quelle compagnie de cochers, de petits artisans, de marchandes de pommes, de malotrus, de gueux, hélas ! mon cher ami de tout ce qui répugne à notre délicatesse mais enfin de ces pauvres que le Sauveur aimait. Ce n’est pas à dire qu’il n’y ait pas de religion dans les hautes classes. Parmi nos collègues de l’Université de Pise il y a des chrétiens, même des convertis.