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loin des qualités que vous m’attribuez depuis que je revois, que je fréquente les œuvres vraiment naïves de l’art chrétien ! Je ne veux rien ôter la gloire de notre architecture gothique ou pour mieux dire française: c’est bien du Rhin à la Seine que siègent comme des reines les plus imposantes cathédrales de la chrétienté. Mais il faut venir en Toscane pour voir se développer ensemble, et dans leur parfaite harmonie, les trois arts du dessin. Ce coin de terre est vraiment pour nous ce que fut la Grèce pour l’antiquité. Je viens de passer huit jours à . Florence, j’ai revu Lucques ; le Dôme de Pise et le Campo Santo sont sous mes yeux; Sienne, Orvieto reviennent sans cesse dans mes comparaisons et dans mes souvenirs. Je ne crois pas que le reste du monde ait rien d’égal. Ailleurs il y a des édifices, on y pose des statues et des tableaux. Mais ici seulement et sur quelques autres points de l’Italie que le génie toscan a visités, il y a des monuments, c’est-à-dire des œuvres sorties de terre d’un seul jet, bâties, sculptées, peintes, animées d’une même pensée, d’une même poésie, auxquelles on ne peut pas plus enlever leurs fresques et leurs bas-reliefs, que leurs fondations et leurs tours. En revoyant les vieux palais de Florence, et ces murs menaçants qui recèlent tant de chefs-d’œuvre de grâce et de délicatesse, je me rappelais l’histoire de Samson, les abeilles faisant leur miel dans la gueule du lion étranglé, et l’énigme que le héros