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Nous partirons donc pour la Toscane, probablement dans quinze jours. Cependant il m’en coûtait trop de quitter l’Espagne si voisine, dont je voyais tous les jours les côtes et les montagnes vertes. Si j’avais tâché d’occuper un peu les journées vidés de cet automne, c’était en étudiant le moyen âge espagnol, son histoire, sa littérature. Je savais peu de chose ; cependant quelques figures commençaient a se mouvoir, quelques institutions à s’animer devant mes yeux. Mais ces scènes, pour ainsi dire, manquaient de fond c’étaient des rêves sans réalité jusqu’à ce que je visse par où ces hommes, ces rois, ces communes, tenaient à la terre. Ne pouvant visiter qu’une ville, j’ai choisi Burgos ; Burgos, le cœur de l’ancienne monarchie, la Mère des rois, comme elle s’appelle, et leur séjour pendant trois cents ans. J’ai fait cette course, et elle m’a tenu plus que je ne m’en étais promis. A Séville, à Tolède, j’aurais trouvé d’admirables épisodes ; à Burgos, j’avais tout le poëme de l’Espagne héroïque et sacrée. J’avais les murs encore en partie conservés, encore percés de portes sarrasines, où Diego Porcellos réunit au neuvième siècle la première commune de Castille. J’ai vu le siège grossier où Laïn Calvo et Nunez de Rasura, juges électifs comme ceux d’Israël, gouvernaient ce peuple sans rois. J’ai salué l’arc de Fernan Gonzalez, premier comte de Castille, dont les aventures remplissent tant de ballades. Des chapelets de têtes sculptées sur les