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à peu près depuis que nous nous sommes quittés, je suis dans un état de fatigue qui m’interdit bien des devoirs et bien des plaisirs. Rien de cela n’est grave et n’a de quoi inquiéter votre amitié. Mais j’admire l’ordre de la Providence qui ne veut pas nous permettre de nous acclimater sur la terre. J’avais tout fait pour me bien établir dans la vie, et vous y aviez beaucoup aidé. Vous savez si j’ai bien réussi à mettre le bonheur à mon foyer ! votre abnégation, votre appui, vos conseils, y avaient ajouté le bien-être, la considération, et le plaisir du travail. Dieu n’a pas souffert que je prisse racine dans une existence si commode. Il m’a laissé les joies du cœur et m’envoie les peines de santé : je le bénis de ce partage. Cependant je le prie d’abréger l’épreuve, et je me soigne de mon mieux, ou plutôt je n’ai qu’à me laisser soigner par quelques personnes qui ne me haïssent pas. Car j’ai bien plus de résignation dans l’imagination que dans la pratique, et il me serait bien dur de me trouver arrêté, au moment même où j’espérais utiliser mes études et mes misérables essais, en mettant la main à une œuvre moins indigne de vos encouragements.

Je travaille un peu, mais lentement, difficilement, et je n’écris pas une page pendant que vous faites cinquante lieues. Pourtant, je trouve quelque douceur dans ce repos même de la campagne, dans ce séjour de Sceaux, d’où les feuilles déjà s’en