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toutes ces.figures pensent,mais toutes ces figures vivent.

Voila le caractère de l’école florentine : nulle part on n’a mieux exprimé la pensée, et nulle part on n’a mieux rendu la vie. Quand la force a rencontré la grâce, quand l’idéal et le réel se sont retrouvés, l'art touche à son apogée, et c’est ce qui arrive à l’avénement de Giotto, le plus grand peintre qui fut jamais, si l’on considère d’où il sortit, et ce qu’il créa.

Cependant l’idéal et le réel ne restent pas longtemps dans cette union féconde. Ils se divisent bientôt, et sont plus particulièrement représentés par des hommes différents. Benozzo Gozzoli, Masaccio, fra Bartolommeo expriment surtout la réalité et la force, Angelico l’idéal et la grâce. J’ai eu tort de dire que le Bienheureux ne traite jamais le nu, qu’il n’a pas le secret des grandes passions, qu’il donne quelque chose de céleste même aux démons, et d’angélique aux damnés. Dans le grand tableau du Jugement dernier, de l’Enfer, et du Paradis, les démons ont d’horribles figures, mais ce sont des figures d’animaux qui tiennent du chat et du singe. Le Bienheureux n’a pas su, il n’a peut-être pas voulu mettre l’empreinte diabolique sur la face humaine. Les réprouvés en général expriment plus de douleur que de rage et de perversité. Enfin Angelico a choisi le moment où le Sauveur se tourne vers les élus « Venez, les bénis de mon