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Le dernier effort de ce travail qui fait pénétrer la civilisation dans le monde barbare, qui rajeunit par la barbarie le monde civilisé, le terme glorieux où aboutit la première période du progrès chrétien, c’est Charlemagne.

Une seconde période s’ouvre ici ; elle s’ouvre par une ruine et par la ruine d’une puissance chrétienne. Au premier abord, jamais chute ne parut plus désastreuse ; car jamais empire ne parut plus nécessaire que celui de Charlemagne, ni mieux fondé. D’un côté, ce grand homme n’avait pas reçu vainement le titre d’avocat de l’Église, qu’il couvrait de son glaive au dehors, et dont il faisait respecter les canons au dedans. D’un autre côté, il renouvelait la monarchie universelle des Césars et cette politique bienfaisante qui devait unir en un seul corps les nations pacifiées. Enfin l’École était dans le Palais, et les lettrés se pressaient autour de ce conquérant qui avait mis la force au service de l’esprit. Cependant un si bel ordre ne devait pas être de longue durée, et Charlemagne avant de mourir en pleura la fin. Il meurt en effet ; trente ans après, son empire croule au traité de Verdun, et ce grand édifice se partage en trois débris. Cependant les flottes des Normands viennent se jeter aux embouchures du Weser, du Rhin, de la Seine et de la Loire ; leurs bandes remontent ces fleuves, saccagent les monastères, jetant au même feu les riches copies de la Bible et les manuscrits d’Aristote et de Virgile. En même temps, les Hongrois, traînant