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Comme vérité, il attire l’homme par la foi, comme bonté par l’amour, comme beauté par l’espérance. En effet, l’esprit humain est capable de posséder le vrai, il est libre d’embrasser le bien : il ne peut qu’entrevoir le beau. Nous définissons le vrai ; il y a longtemps que l’école dit : « Le vrai, c’est l’équation de l’idée et de l’objet, æquatio intellectus et rei. » Nous définissons le bien ; il y a plus longtemps encore qu’Aristote a dit : « Le bien, c’est la fin où tendent tous les êtres. » Mais nous ne définissons pas le beau, ou plutôt les philosophes se sont épuisés sans obtenir une définition qui devînt classique. Platon prononce que le beau est la splendeur du vrai. Selon saint Augustin, la beauté c’est l’unité, l’ordre, l’harmonie. Mais précisément le beau absolu est l’harmonie absolue des attributs divins ; et nous percevons si peu cette harmonie, que nous ne savons concilier la liberté de Dieu avec son éternelle nécessité, sa justice avec sa miséricorde. Ces accords mystérieux nous échappent en même temps qu’ils nous attirent, et la beauté parfaite toujours absente est aussi toujours espérée.

L’homme, selon le christianisme, vit de deux vies : la vie de la nature et celle de la grâce qui s’ajoute à la nature. Dans l’ordre surnaturel, le vrai révélé à la foi constitue le dogme, le bien embrassé par l’homme produit la morale, le beau entrevu par l’espérance inspire le culte. Il semble qu’ici tout soit immuable, et cependant Vincent de Lérins veut que la loi du progrès s’y fasse obéir. Le dogme ne change point, mais la foi est