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de janvier, célébrées par des chœurs de musiciens et de danseurs qui parcouraient la ville « avec des chants sacriléges et des acclamations à la manière des idolâtres. » Lorsque les villes italiennes renaissant à la liberté s’empressèrent de se constituer à l’image de Rome, lorsqu’elles eurent des consuls, elles voulurent des jeux publics. On y célébra des courses de chevaux et de piétons ; mais les réminiscences de la luxure antique vinrent se mêler à ces délassements ; et, à l’exemple des fêtes de Flore, on donna des courses de courtisanes. Si l’Italie du moyen âge ne renouvela pas les combats de gladiateurs, elle ne renonça cependant pas aux spectacles sanglants. À Ravenne, à Orvieto, à Sienne, la coutume avait fixé des jours où deux bandes de citoyens prenaient les armes et s’entre-tuaient pour le plaisir de la foule. Pétrarque, en 1546, s’indigne d’avoir vu recommencer à Naples les tueries du Colisée. Il raconte qu’entraîné un jour par quelques amis, il se trouva non loin des portes de la ville, dans un lieu où la cour, la noblesse et la multitude, rangés en cercle, assistaient à des jeux guerriers. De nobles jeunes gens s’y égorgeaient sous les yeux de leurs pères ; c’était leur gloire de recevoir avec intrépidité le coup mortel, et l’un d’eux vint rouler tout sanglant aux pieds du poëte. Saisi d’horreur, Pétrarque enfonça l’éperon dans les flancs de son cheval, et s’enfuit en jurant de quitter avant trois jours une terre abreuvée de sang chrétien[1].

  1. Muratori, Dissert, 29 de Spectaculis et ludis publicis medii ævi, p.832, 833, 852. — Pétrarque, Familiarium, lib. V. epist. 5. « Cum luce media,