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munités qui entouraient la châsse de leurs saints ; d’un autre côté, les villes nouvelles se multipliant autour des abbayes ; car, de même que toutes les puissances civilisatrices, l’Église aime à bâtir. Mais l’Église ne bâtit plus comme les Romains. Le christianisme a pour ainsi dire retourné l’aspect des villes en même temps que les mœurs des hommes. Tout l’homme de l’antiquité était tourné vers le dehors ; il vivait sur la place publique ou dans l’atrium richement décoré où il recevait ses clients. Il négligeait le reste de sa maison. Les chambres étroites qui s’ouvraient sur le péristyle étaient bonnes pour les femmes, les enfants, les esclaves. Mais le christianisme tourne le cœur de l’homme vers les joies intérieures ; il lui fait trouver le bonheur à son foyer et embellir le lieu où il passe sa vie avec sa femme et ses enfants. De là ce luxe de boiseries, de tapisseries, de meubles richement sculptés qui faisait l’orgueil de nos ancêtres. Cependant, au premier abord, les villes modernes semblent le céder de beaucoup aux cités antiques. Les anciens faisaient leurs temples petits, mais les amphithéâtres étaient immenses, les bains magnifiques, les portiques et les colonnades innombrables. Au contraire, la ville chrétienne se groupe humblement autour de sa cathédrale où elle a mis tout son effort. Si elle y ajoute quelque autre monument, c’est le palais communal, l’école, l’hôpital. Les anciens bâtissaient pour le plaisir, et c’est en quoi il faut désespérer de les égaler jamais. Nos villes sont construites pour le travail, la douleur et la prière ; et c’est à savoir souffrir, travailler et prier que