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les rudes accents aux cris des vautours. La croissance des langues néolatines devait être plus lente. Toutefois, dès le neuvième siècle, les traces de leur existence se multiplient. Le concile de Tours prescrivait de prêcher en langue vulgaire. Il fut obéi : nous en avons la preuve dans une homélie récemment découverte et qu’on ne peut placer au-dessous de l’an 1000. On y trouve un mélange de mots français et latins confondus dans une syntaxe barbare. De ce chaos où se débat le vieux prédicateur sortira cependant la langue de Bossuet.

La civilisation doit donc vaincre, mais après avoir couru les derniers périls. Le plus grand de ces périls était dans l’Église, déshonorée à Rome par la profanation du saint-siége, envahie de tous côtés par les mœurs féodales, qui changeaient les prélatures en fiefs et les évêques en vassaux. Il fallait donc que le salut vînt de l’Église et de la partie de l’Église où la vie spirituelle s’était surtout réfugiée ; ce fut une réforme monastique, celle de Cluny, qui décida de la destinée du monde. Un moine français appelé Odon, qui avait étudié à Paris, alla cacher son savoir et sa vertu dans un monastère, à quatre lieues de Mâcon, au fond d’une vallée silencieuse à peine troublée de temps en temps par les cris des chasseurs et les aboiements des chiens. Il y introduisit une observance austère, qui n’excluait ni la passion des lettres, ni le culte des arts, et dont l’ascendant finit par ranger sous le gouvernement de Cluny un nombre considérable de monastères en France, en Italie, en Angleterre. L’unité d’hiérarchie, d’administra-