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avait quarante fois célébré les Parilies, quand la déesse qui préside au feu sacré fut reçue dans un temple; ce fut l'oeuvre d'un roi pacifique, [6, 260] le mortel le plus soumis aux dieux qui fût né jusque-là au pays des Sabins. Ce toit que vous voyez, d'airain aujourd'hui, alors vous l'eussiez vu de chaume; des branches d'osier flexible, entrelacées ensemble, en formaient les murs. Sur cet espace étroit qui porte le parvis de Vesta, s'élevait autrefois la demeure auguste de Numa à la longue chevelure; [6, 265] on dit cependant que la forme du temple a été conservée telle qu'elle était alors, et cette forme tient à des raisons que je vais exposer. Vesta est la même que la terre; l'une comme l'autre entretient un feu éternel; la terre et le foyer sacré nous indiquent, par leur aspect même, la présence de Vesta. La terre, semblable à une balle de paume, se soutient sans appui, [6, 270] quoique si pesante, au milieu de l'air qui l'environne. Arrondie en globe, cette rotondité même la fait rester en balance. Point d'angle qui permette de contact avec aucun des points de sa surface; ainsi, elle est suspendue au milieu de l'univers, sans être plus ou moins voisine d'aucune des parties dont il se compose. [6, 275] Si elle n'était point ronde, elle se trouverait plus près de quelqu'une de ces parties, et alors la masse de la terre serait déplacée du point qu'elle occupe au centre de toutes choses. Dans la citadelle de Syracuse, il est un globe suspendu au milieu d'un air sans issue: image en petit de l'immense univers. On y voit la terre aussi éloignée des parties inférieures que des parties supérieures; [6, 280] c'est sa forme ronde qui la fixe dans cette position. Tel est aussi l'aspect que présente le temple de Vesta; l'oeil y chercherait en vain la saillie de quelque angle, et un dôme la met à l'abri des eaux de la pluie.

Vous demandez pourquoi la déesse veut des vierges pour ministres de ses autels? Ici encore je vous ferai connaître la vérité. [6, 285] On dit que Saturne rendit d'abord Ops mère de Junon et de Cérès; Vesta naquit la troisième; les deux premières devinrent épouses, et enfantèrent à leur tour; une des trois refusa seule de se livrer aux embrassements d'un époux. Faut-il s'étonner si, vierge elle-même, elle veut des vierges pour prêtresses, [6, 290] ne confiant qu'à de chastes mains le soin de son sanctuaire? Qu'est-ce en outre que Vesta, sinon la flamme ardente? or, la flamme n'a jamais rien engendré; c'est donc à bon droit qu'elle est vierge, et qu'elle s'entoure de compagnes vierges aussi, celle qui ne donne et ne reçoit aucun germe de vie.

[6, 295] J'ai cru longtemps, dans mon ignorance, qu'il existait des statues de Vesta; j'ai appris naguère que le dôme de son temple n'en abritait aucune; là seulement se conserve un feu qu'on ne laisse jamais éteindre; mais il n'est point d'images qui représentent ni le feu ni Vesta.

La terre se soutient par sa propre force; de