Page:Ourliac - Nouvelles.djvu/85

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Il est sorti, dit le portier étonné.

— Le gredin se cache, mais on le trouvera. Dites-lui de ma part qu’il est une canaille, et que Schérer, avec son témoin, le nommé Lapointe, ici présent, est venu en homme d’honneur pour lui mettre son sabre dans le ventre, et qu’il ne s’échappera pas. Suffit ; viens-nous-en, Lapointe.

Ils firent demi-tour sur leurs pivots de bois et s’en retournèrent. On ne rendra pas compte de leurs démarches successives, qui furent si pressées, si persévérantes, si multipliées, que le Baffi épouvanté n’osa plus mettre le pied hors de son appartement où il se faisait garder par son domestique ; enfin il fut obligé de s’en aller chercher un refuge chez un Italien de ses amis chassé de son pays pour complots politiques. Il ne pouvait paraître dans un lieu public, il n’osait se hasarder la nuit dans les rues sans craindre de voir paraître la redoutable figure de l’invalide, qui, dans son esprit, s’était changé en une espèce d’ogre et de croquemitaine. Cet état de choses eut pour résultat, premier châtiment d’une liaison coupable, de rompre momentanément tout rapport entre le jeune gentilhomme et sa Cécile.

Mais que ne se passait-il pas chez Cécile elle-même ? Écrasées par l’effroyable scandale qui avait suivi ce bal si chèrement médité, les pauvres femmes n’osèrent sortir de quelques jours, pour laisser passer les premières chaleurs de la honte ; mais elles ne demeurèrent pas longtemps dans cette solitude cuisante. Schérer les poursuivait avec autant d’acharnement qu’il en mettait à poursuivre Baffi ; il parut à divers intervalles comme un spectre vengeur