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Dupuytren eût opéré Bonaparte. Le cor était fièrement à la même place, dans une auréole de cette résine, qui lui donnait tout à fait bon air d’une grosse vilaine plaie.

— Il faut que tu sois d’un tempérament terriblement sec, dit Thibault ; le mal persiste ; mais tu n’as qu’à recommencer la même opération jusqu’à plein succès.

Mon père, pour ménager l’amour-propre de son ami, changea de propos.

— Eh bien, quelles nouvelles d’hier ?

— Un vrai guet-apens ! et cela ne m’a point surpris. Je connais toutes les ressources de l’intrigue et de la police. Les gens sans mérite, les routiniers qui n’ont pour eux que la bassesse et l’audace, perdraient trop à l’avènement de la vérité. Il faut se liguer, cabaler, mettre la lumière sous le boisseau. La police était sans doute informée de mon arrivée à Paris. Je me présente à l’hôtel du ministère, il y avait d’abord dans la rue une foule de gens apostés qui ricanent sur mon passage. Le concierge m’interroge, je lui réponds d’un air impérieux que je veux voir son excellence ; il faut en pareil cas de la fierté, non celle d’un insolent parvenu, mais celle qui convient à l’honnête homme. Ma contenance impose à ce subalterne, il me conduit dans une espèce de bureau où se trouvaient plusieurs personnes… Je n’ai pas plutôt lâché quelques mots de l’objet de ma démarche, qu’on me rebiffe, qu’on me toise, on me renvoie… Tu conçois, Giusep, l’envie, l’orgueil, l’ignorance démasquée qui se réveillent aussitôt… Enfin on me chasse, et fort grossièrement, et quelques-uns de ces valets