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dres furent dirigés contre lui ; des malveillants rapportent jusqu’à la commune que Thibault s’est vanté de brûler la cervelle au premier qui tenterait de l’arrêter. Le lendemain, je rencontre sur la place le capitaine de gendarmerie, mon ami intime et celui de Thibault, qui m’apprend avec émotion qu’on va procéder à l’instant même à l’arrestation de notre camarade. J’oublie nos différends, et je suis les gendarmes, prévoyant quelque extrémité où je pourrais me rendre utile.

Thibault parut, en effet, à sa fenêtre, un pistolet de chaque main. Je m’étais arrêté avec le capitaine de l’autre côté de la rue ; dans nos relations présentes, je n’avais mot à dire à Thibault, qui put croire que je venais me régaler de sa mauvaise affaire ; le capitaine essaya de lui parler, mais Thibault ne l’entendit pas ; il nous toisa bravement, les pistolets fermes dans les poings, comme si cette menace s’adressait à nous indistinctement. Cependant les gendarmes s’introduisirent dans la maison par la porte de la rue, demeurée sans défense, et parvinrent à se loger dans une pièce contiguë à l’appartement où Thibault s’était fortifié.

— Cet animal va se faire tuer, me dit le capitaine en s’élançant après ses hommes.

Les deux fenêtres de Thibault étant ouvertes, et d’un étage assez bas, je voyais fort bien ce qui se passait dans la chambre, monté sur le degré d’une boutique qui s’était trouvé sous mes pieds. J’entendis trois coups de feu qui me firent frémir, puis sa chambre se remplit de fumée ; je crus mon ami mort. Mais bientôt je le vis reparaître, reculant vers les fenêtres, ses pistolets tendus en avant, la