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part je ne suis d’accord avec aucune des exagérations qu’elle contient ».

Cette déclaration ne lui suffit pas, il prie de prendre en considération qu’il s’agissait d’un homme avec qui il était en vive controverse en raison même de ses idées. « Pouvais-je donc avoir l’intention de donner sa lettre pour un modèle, pour une formule obligatoire ? Je viens de comprendre que j’ai commis une faute et que je n’aurais pas dû lire cette lettre devant ce monde. »

Pétrachevsky était un disciple de Fourier, et c’est le jour de l’anniversaire de la mort de ce dernier qu’on l’arrêta avec ses amis réunis chez lui. Dostoïevsky juge donc nécessaire de dire, dans sa Défense, quelques mots du fouriérisme. Il trouve que le système de Fourier est un système pacifique dont la beauté charme l’âme et saisit le cœur grâce à cet amour de l’humanité qui animait celui qui le créa ; c’est un système qui oblige l’esprit à admirer son harmonie : il est étranger à toute baine. C’est un système théorique qui ne sera jamais populaire. Pourtant, il est nuisible, d’abord parce qu’il est un système, ensuite parce que, malgré toute sa beauté, il restera toujours une utopie : mais le mal causé par cette utopie est, s’il est permis de s’exprimer de la sorte, un mal ridicule plutôt que redoutable. En résumé, le fouriériste (c’est-à-dire Pétrachevsky) est « un malheureux, mais non un criminel ».

Cette défense est d’un piètre révolutionnaire. En dehors du passage concernant la France, elle n’est même pas à l’honneur de l’auteur de Crime et Châtiment.

Le jugement de Dostoïevsky sur Biélinsky est scandaleux. Biélinsky est une des plus sympathiques figures de la Russie ; il n’a jamais été en Sibérie, mais son influence intellectuelle et morale sur le mouvement des idées en Russie n’en est pas moins considérable, c’est le tribun