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la poussière des êtres disparus, finit par vous angoisser plus encore que des plaintes.

Car l’âme peut bien se créer un monde différent de celui que normalement elle aurait dû se créer, monde obscur et informe, mais où elle vit, ne pouvant plus vivre que là. Si désordonnés qu’ils soient, les mouvements de cette vie sont les seuls que cette âme peut accomplir avec joie, avec la joie que procure le sentiment de la vie. Cette joie n’est pas absolue ; fatalement il s’y mêle, si cette âme n’a pas faussé tous ses ressorts, une certaine amertume, un trouble secret qui l’empêche de la considérer comme définitive et le fruit de la dernière étape. Ne serait-ce que cette voix lointaine qui crie éternellement dans le cœur de chaque homme son inexorable appel, son inlassable « marche, marche toujours », il n’en faut pas plus pour l’empoisonner. On a beau de ses mains crispées retenir la toile de la tente que nous avons plantée au milieu du désert, que