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UN SAUVETAGE

— Quelle charmante soirée, cher Monsieur !

Et elle ajouta en glissant un regard engageant au jeune homme.

— Quelle charmante promenade…

— En effet, Madame, il fait vraiment exquis se promener au crépuscule, en face de la mer. Surtout quand on est resté enfermé toute la journée.

— Oh ! je connais cela, moi aussi je travaille toute la journée. Vous ne sauriez croire combien mon œuvre des « Chiens égarés » me donne de l’occupation…

— Vous donne-t-elle au moins quelque satisfaction ?

— Je ne me plaindrais pas si j’avais quelqu’un pour m’aider. Mais le baron, qui en est le vice-président, ne m’aide pas beaucoup, et, moi, la présidente, il faut que j’assume toute la besogne.

— Vous en serez récompensée, Madame.

— Je l’espère sans trop y compter, toutefois. Votre sénateur devait me faire avoir les palmes, et voyez comme ça traîne.

— Un peu de patience, Madame, ça viendra.

— Peut-être, mais à force d’avoir de la patience, ça ne vient pas, et, vous savez, dépêchez-vous. J’ai reçu de la partie adverse des propositions fort engageantes.

— Vraiment ?

— Mais oui. M. Comtois, le concurrent de M. Montfort aux prochaines élections, m’a écrit. Il sait que je désire les palmes, il sait aussi que j’aurai beaucoup d’influence pour ses élections. Si je veux soutenir sa candidature, il me jure qu’il me fera avoir les palmes tout de suite et la rosette à bref délai.

— Non ?

— Je vous jure.

— Mais non, voyons !

— Que vous êtes drôle ! Voulez-vous voir sa lettre ?

— Je veux bien.

— Et bien, je vous l’apporterai.

— C’est entendu.

— Ainsi, vous voyez… Ah ! si ce n’était pas pour vous… ajouta-t-elle en glissant vers Maurice un regard plus engageant encore.

Le jeune homme éluda le regard et l’allusion en répondant qu’elle aurait ses palmes à bref délai : maintenant que les démarches essentielles étaient faites et le succès pro-