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je parviendrois à une célébrité que je ne puis eſpérer, on me verra toujours cette même ſimplicité que j’ai eue avant d’être Auteur. Voilà, ſans m’en appercevoir, la moitié de mon roman. Depuis long-tems je voudrais finir & l’impitoyable envie de parler me force à pourſuivre. Malgré moi je me laiſſe entraîner au penchant de mon ſexe. Ah ! cher Lecteur, je vous vois déjà frémir à cette repriſe d’haleine ; mais raſſurez-vous, j’achève, en vous obſervant, que ſi vous voyez des Sauvages dans le Drame que l’on va jouer, à la place des Nègres, c’eſt que la Comédie n’a pas voulu haſarder cette couleur ſur la Scène ; mais que c’eſt en tout l’Hiſtoire effroyable des Nègres que j’ai voulu traiter. Eh ! qu’importe après tout le coſtume & la couleur, ſi le but moral eſt rempli. Pour le Cocu ſuppoſé, traitez-le comme vous le jugerez à propos. Il a fallu me rappeller en votre mémoire. J’ai fait peut-être un mauvais choix dans mes manuſcrits, ou, pour dire la vérité, c’eſt ma dernière production. On pourra aiſément croire qu’elle m’a plu davantage. Je vous la livre donc ſans être vue ni touchée. J’aurois bien voulu avoir le tems de la décorer d’un peu de Poéſie. J’ai fait par haſard d’aſſez heureux couplets ; mais pour conſtruire une Romance, des duo, des chœurs, je n’entends rien à cette beſogne. Il me faudroit bien dix ans pour en venir à bout ; hé ! comment m’y réſoudre ! moi qui n’ai pas la patience de mettre dix jours pour traiter un ſujet ? Si je me vante de cette facilité, j’avoue que je la rachète bien par les agitations fatiguantes qui altèrent ma ſanté & me forcent enſuite à me repoſer. On y adoptera des morceaux propres au ſujet, ſi ceux que j’indique ne