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DE SIR TRISTREM

Ysonde reconnaît la bague d’or, gage amoureux que lui envoyait Tristrem. Ganhardin, introduit auprès d’elle, lui apprend que Tristrem est blessé dans sa vieille blessure, et que si elle ne vient le guérir, il périt, le pauvre chevalier !

Ysonde s’afflige du récit qu’elle entend ; elle se déguise en page pour partir avec Ganhardin. Les voilà embarqués ; un vent propice les conduit. Ysonde, bien chagrine, verse des larmes amères. Ganhardin appareille la voile blanche.

Ysonde de Bretagne à la blanche main aperçoit le vaisseau qui s’approche du rivage ; elle remarque la voile blanche : — Voici Ysonde qui vient m’enlever mon perfide époux ; mais je jure qu’elle ne sera venue ici que pour son malheur.

Elle accourt vers Tristrem étendu dans son lit.

— Tristrem, dit-elle, bonne nouvelle ! tu seras guéri : je découvre le vaisseau sur lequel Ganhardin revient pour calmer ta souffrance !

— Quelle voile est au vaisseau, dame ? au nom de Dieu tout-puissant !

Ysonde veut être vengée de Tristrem, l’amant fidèle, et lui répond : — La voile est noire, noire comme la poix : — Tristrem retombe en arrière, croyant Ysonde déloyale ; son tendre cœur s’est brisé, s’est brisé en deux ! Que là-haut le Christ le reçoive en merci ! il mourut d’amour fidèle. [1]

  1. Cette scène touchante est ainsi rendue dans un fragment en vers :
    Turne sei vers la paroie (la muraille)

    Donc dit : Deus salt Ysolt et mei !
    Quant à mei me voler venir
    Pur votre amur mestu et mourir.
    Je ne puis plus tenir ma vie :
    Pur vus muera Ysolt, belle amie !
    N’aver pité de ma langue,
    Maz de ma mort aurez dolur !
    Ça m’est m’amie, grant confort

    Que pité aurez de ma mort !