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DE SIR TRISTREM

à Ysonde ; il dit qu’elle avait eu plus d’une occasion de le tuer lorsqu’il était son précepteur Tremtris. Il rappelle les bons services qu’il lui a rendus à ce titre, et se fait aussi un mérite des éloges qu’il a faits d’elle au roi Marc. Enfin, il fait connaître sa mission d’ambassadeur.

Tristrem ayant pris l’engagement, au nom de son oncle, que ce monarque épousera Ysonde, il est convenu qu’elle partira sous son escorte pour le royaume de Cornouailles. L’intendant n’a pas plus tôt appris que son antagoniste est le redouté Tristrem, qu’il renonce à racheter son gage et à réclamer le prix de la mort du serpent. Il est mis en prison, à la demande de la princesse.

La fiancée, Tristrem et ses chevaliers, sont à la veille de leur départ. La reine appelle Brengwain (Brenguien), demoiselle chargée de servir Ysonde, et lui remet un philtre puissant, ou boire amoureux, en lui recommandant de le faire prendre au roi Marc et à son épouse le soir de leur mariage[1]

Les voilà en mer : le vent devient contraire ; on est forcé d’avoir recours à la rame. Tristrem s’exerce à ramer ; et Ysonde, le voyant fatigué, demande un breuvage pour lui rendre ses forces et le rafraîchir. Brengwain, par inadvertance, lui donne la coupe qui contient la fatale liqueur. Tristrem et Ysonde l’approchent tous deux de leurs lèvres, et la vident. Un chien favori, appelé Hodain, en lèche les dernières gouttes. L’effet de ce breuvage est la malheureuse passion qui rendit Tristrem et Ysonde criminels et si malheureux[2]

Le vaisseau arrive en Angleterre après une traversée d’une quinzaine de jours. Ysonde épouse le roi Marc. Mais

  1. « Ce breuvage est appelé le boire amoureux ; car sitôt comme le roy Marc en aura beu, et ma fille apréz ; ils se aymeront si merveilleusement que nul ne pourroit mettre discord entre eux. » (Sic dans le texte d’un vieux manuscrit français sur Tristan.) — Ed.
  2. C’onques Tristan, Yseult la-Blonde
    Né nulle femme de cest monde
    N’aura oncques si fort melui
    Comme elle fist tantôt celui. (La vieille Truandes.)— Ed.