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sa rosée sur les tombeaux des fils d’Alpine ! Traître à son Chef, il ne mêlera point sa poussière à celle des guerriers de sa race ; mais , rejeté loin de ses pères et de sa famille, il entendra tout le clan le maudire et appeler le malheur sur sa tête.

Ici Brian s’arrêta. Ses derniers mots furent répétés par les vassaux de Roderic, qui, faisant un pas en avant et jetant des regards terribles, agitèrent leurs épées dans l’air, et choquèrent rudement leurs boucliers. Leurs clameurs confuses s’élevèrent d’abord comme un murmure lent et prolongé ; puis, semblables au cours d’un torrent qui se précipite en courroux vers la mer, et brise contre le rivage tous ses flots réunis, elles éclatèrent avec fracas : — Malheur au traître ! malheur !

La tête chauve du Ben-An fut frappée de ces accens ; le loup sortit avec joie de sa retraite, et l’aigle poussa un cri de triomphe en reconnaissant le cri de guerre du clan d’Alpine.

X.

Quand le silence régna de nouveau sur le lac et dans la forêt, le moine continua ses exorcismes. Pendant qu’il approchait du feu les extrémités de la croix, sa voix sourde avait un son qui inspirait la terreur : le peu de mots qu’on entendit ressemblaient plutôt au blasphème qu’à la prière, quoiqu’il y eût mêlé le saint nom de la Divinité ; mais, quand il agita sur la foule la croix allumée, il s’écria :

— Maudit soit le misérable qui refuse de s’armer de la lance à l’aspect de ce signal redouté ! De même que le feu dévore ce symbole, un pareil sort l’attend dans sa demeure, asile de la lâcheté ! Les tourbillons de l’incendie y proclameront la vengeance du clan d’Alpine, tandis que les jeunes filles et leurs mères appelleront sur sa tête la misère et la honte, l’infamie et la douleur l Alors retentirent les aigres clameurs des femmes, semblables aux sifflemens des autours sur les montagnes : leurs imprécations s’unissaient aux bégaiemens de l’en-