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pénible qui déchirait le cœur de sa fille, comme si la vie y eût été aux prises avec la mort. Tout son sang en effet avait un moment coloré ses joues, qui presque aussitôt furent couvertes d’une pâleur mortelle. — Roderic , s’écria le vieillard, ma fille ne peut être ton épouse. Cette soudaine rougeur n’est pas celle qui fait sourire les amans, cette pâleur n’exprime point les craintes d’une pudeur timide. Cet hymen est impossible. Pardonne-lui son refus, noble Chef, et ne hasarde plus rien pour notre sûreté. Douglas ne lèvera jamais une lance rebelle contre son roi : ce fut moi qui instruisis sa jeune main à guider les rênes d’un coursier et à manier une épée. Je crois voir mon prince encore enfant ; Hélène ne me rendait ni plus fier ni plus heureux ; je l’aime encore malgré les outrages dont il m’accabla dans le premier mouvement d’une colère irréfléchie, et trompé par de perfides délateurs. O Roderic ! demande ton pardon ; il te sera facile de l’obtenir en séparant ta cause de la mienne.

XXXIII.

Deux fois le Chef parcourut la salle à grands pas ; son front farouche où le dépit le disputait à la colère, et les plis flottans de son tartan, le faisaient apparaître, à la sombre lueur des torches, comme le démon malfaisant de la nuit qui étend ses noires ailes sur le pèlerin égaré ; mais l’amour dédaigné perçait surtout le cœur de Roderic de ses traits envenimés. Rodèric saisit la main de Douglas. Ses yeux, qui jusque-là ignoraient les larmes, en versèrent pour la première fois de bien amères ; les angoisses d’un espoir trahi luttaient dans son sein, avec son orgueil qui ne pouvait étouffer entièrement ses sanglots convulsifs, trahis par le silence qui régnait autour de lui.

Hélène ne put supporter le désespoir du fils et les regards de la mère ; elle se leva pour s’éloigner, Grœme se préparait à suivre ses pas et à la soutenir,